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Nos correspondants et envoyés spéciaux sur le continent africain vous proposent, chaque jour, en deux minutes une photographie sonore d'un évènement d'actualité ou de la vie de tous les jours. Ils vous emmènent dans les quartiers ou dans les campagnes pour vous faire découvrir l'Afrique au jour le jour.
- 1168 - Au Ghana, les réfugiés ivoiriens, privés de droits, sont plongés dans la précarité
Au Ghana, voilà plus d’une décennie qu’environ un millier d’Ivoiriens ont établi domicile après avoir fui, en 2011 pour la plupart, les violences causées par la crise électorale. Beaucoup y ont créé leurs commerces, poursuivi des études ou même fondé une famille. Pas question pour eux donc de rentrer en Côte d’Ivoire. Sauf que depuis la cessation officielle de leur statut de réfugié en 2022, leur vie a basculé dans une grande précarité. Pourtant, un accord signé entre le gouvernement ghanéen et l’ONU leur garantit un permis de séjour permanent. Aujourd’hui, certains d’entre eux revendiquent leurs droits.
De notre correspondant à Accra,
Pas de fenêtres, des parpaings apparents, des parois humides, tel est le lieu où Geneviève Taboh, 47 ans, a trouvé refuge avec ses sept enfants et petits-enfants. « Ce n’est vraiment pas facile, la souffrance continue », déplore-t-elle.
Cette Ivoirienne, qui a fui son pays lors de la crise électorale de 2011, a pour seul papier sa carte de réfugiée. Un document qui, malgré la cessation officielle de leur statut fin 2022, est toujours censé lui garantir les mêmes droits qu’un citoyen ghanéen, selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés. Mais selon Geneviève Taboh, il n’en est rien : « Avec ça, on nous donne seulement du papier hygiénique et du savon, c’est tout. Tu es malade, tu te soignes toi-même. Il n’y a pas de travail, nous n’avons aucun document qui nous permet de travailler dans la société. »
« Nous ne pouvons ni travailler, ni faire autre chose »
Comme Geneviève Taboh, ils sont environ 500 Ivoiriens à avoir demandé un permis de séjour sur le sol ghanéen. Des documents normalement garantis par un accord signé entre l’ONU et le Ghana. Sauf qu’aujourd’hui, les anciens réfugiés attendent toujours, alors que leurs passeports ont bel et bien été transmis par la Côte d’Ivoire aux autorités ghanéennes en mars 2023.
De quoi provoquer l’incompréhension et la colère d’Eric Kiple, président de l’association des Ivoiriens intégrés au Ghana : «Quand les passeports ont été remis au Ghana refugee board (Bureau ghanéen des réfugiés), il y a eu une cérémonie. Après qu’ils ont pris nos informations biométriques, nous n’avons plus entendu parler du Ghana refugee board, ni du service d’immigration,s’indigne-t-il. Nous ne pouvons ni travailler, ni faire autre chose… Nous sommes dans une situation de précarité totale, parce que le Ghana refuse de signer nos passeports et de nous fournir une “Non-citizen card”.»
Cette situation, le Bureau ghanéen des réfugiés ne l’ignore pas. Mais selon son secrétaire exécutif, Tetteh Padi, ce délai s’explique par le caractère inédit de la démarche : « Nous sommes tout autant pressés de fournir les papiers. Mais malheureusement, puisque c’est la première que nous faisons cela, il n’existe pas de procédure. Il a fallu que l’on saute des étapes tout en s’assurant que nous étions dans le cadre de la loi. Et c’est cela qui prend beaucoup de temps. »
Aucune date n’a, à ce jour, été annoncée quant à la délivrance de ces titres. Sans réponse rapide des autorités, l’association des Ivoiriens intégrés au Ghana prévoit très prochainement de manifester.
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Fri, 15 Nov 2024 - 1167 - Trois Kényanes racontent les femmes africaines qui ont marqué l'Histoire dans le podcast KaBrazen
Mettre en avant les histoires de femmes qui ont marqué et continuent d’influencer le continent africain, c’est l’objectif du podcast KaBrazen, au Kenya. Pensé pour les enfants de 4 à 10 ans, il jongle entre faits historiques et fiction pour raconter les vies de femmes africaines. Les épisodes sont disponibles en anglais et en kiswahili. Derrière les textes, trois artistes kényanes et leur studio, LAM Sisterhood. Le résultat : des épisodes mélangeant narration et musique.
De notre correspondante à Nairobi,
La combattante anticolonialiste kényane Mekatilili wa Menza, la reine Njinga en Angolaou encore la poétesse burundaise et militante des droits humains Ketty Nivyabandi, chaque épisode de KaBrazen explore la vie d’une femme africaine qui a marqué le continent, qu’elle soit une contemporaine ou une figure historique. Une façon de mettre ces femmes en lumière. « Je ne demande qu’à ce que l’on me prouve le contraire, mais à ce jour, je n’ai pas trouvé de programme scolaire qui mette en avant le point de vue des femmes africaines,explique Anne Moraa, une des autrices du podcast. Pour moi pourtant, et pour notre collectif LAM Sisterhood, c’est essentiel, car nous sommes nous-mêmes des femmes africaines. Regarder notre Histoire à l’échelle mondiale et avoir l’impression de ne pas exister, c’est fou. Nous voulions rendre accessibles ces récits pour les enfants à travers le monde. »
« Beaucoup d’histoires de ces femmes sont difficiles à trouver »
Aux origines de KaBrazen, il y a une pièce de théâtre que LAM Sisterhood a monté pour présenter des histoires de femmes. Puis l’envie est venue de les raconter aux enfants. Si le projet est éducatif, il doit aussi rester divertissant. Les épisodes mélangent aussi bien des faits historiques que des éléments de récits, de mythes, de légendes et des chants.
« Beaucoup d’histoires de ces femmes sont soit difficiles à trouver, car elles n’ont pas été archivées, soit elles ont été confinées à des espaces académiques, soit elles ont été racontées par des personnes qui ne nous représentent pas,analyseAleya Kassam, une des femmes derrière le podcast. Donc nous comblons les manques avec notre imagination. Il faut garder en tête que nous nous adressons à des enfants de 4 à 9 ans. Il faut réussir à transformer des notions très complexes, comme le colonialisme, en histoires que les plus petits peuvent comprendre. C’est là que l’imaginaire joue un rôle. »
Les histoires sont racontées par un personnage nommé Aunty Shishi. Laura Ekumbo lui prête sa voix. C’est la dernière membre du trio de LAM Sisterhood. Elle le reconnait, choisir les portraits de femmes n’est pas chose facile : « Ce qui était important pour nous, c'était d’abord d’avoir une diversité géographique, c'est-à-dire que les épisodes représentent les femmes de plusieurs pays du continent. Et puis nous avons aussi voulu une diversité en termes d’expériences, d’histoires, de façon à ce qu’un maximum d’enfants y trouve un intérêt. »
À travers KaBrazen, Anne, Aleya et Laura espèrent inspirer les plus jeunes. Le trio rêve de voir les épisodes traduits en plusieurs langues parlées sur le continent.
La deuxième saison est en cours de diffusion. Les épisodes sont disponibles sur l’ensemble des plateformes de podcast et sur le site du podcast.
À écouter, notre podcast sur les questions de genre dans les sociétés contemporaines africaines Bas les pattes !
Thu, 14 Nov 2024 - 1166 - Journalisme d’investigation en Afrique: se protéger sur internet [3/3]
Fin octobre s'est tenue la conférence annuelle sur le journalisme d’investigation en Afrique à l’université du Witwatersrand, à Johannesburg. Sur le continent, la liberté de la presse reste fragile : selon le classement annuel de Reporters sans frontières, dans près de la moitié des pays, la situation est « problématique » ou pire. Les journalistes d’investigation font face à de nombreuses tentatives d’intimidation, avec détentions arbitraires et même meurtres. Mais ils doivent aussi prendre leurs précautions en ligne.
De notre correspondante à Johannesburg,
Les journalistes ne sont pas immunisés contre les attaques numériques et leurs conséquences, qui peuvent se traduire de façon bien réelle. « Quand on fait du journalisme d’investigation, on s’expose naturellement aux critiques, mais il y a des fois où cela va bien au-delà, avec des cas de campagnes de désinformation très spécifiques et ciblées qui nous visent nous ou notre organisation,explique John-Allan Namu, le co-fondateur du média d’enquête Africa Uncensored. On en a fait l’expérience lors des manifestations de juin au Kenya. On peut aussi voir ses informations privées être divulguées en ligne, ce qui s'appelle le doxing, par exemple votre adresse, ou bien les gens révèlent où vos enfants vont à l’école. Ça ne m’est pas arrivé, mais j’ai vu d’autres personnes en être victimes. »
73% des femmes journalistes victimes de violences en ligne dans le cadre de leur travail
La sécurité physique des journalistes peut donc être en jeu, tout comme leur bien-être mental, en cas de cyber-harcèlement. Et les femmes sont particulièrement touchées : dans une récente enquête mondiale de l’Unesco et du Centre international des journalistes (ICFJ), 73% d’entre elles déclaraient avoir subi des violences en ligne dans le cadre de leur travail.
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« Imaginez-vous, j’ouvre mon téléphone et je vois sur Facebook, où j’ai publié un article, des gens en train de m’insulter,témoigne Madeleine Ngeunga, journaliste camerounaise spécialisée dans les enquêtes environnementales et rédactrice en chef pour l'Afrique au Centre Pulitzer. On n’est pas sans cœur, on va y penser toute la journée. Et si ça se répète, si à chaque avis qu’on donne sur les réseaux sociaux les gens nous insultent, nous traquent, je pense qu’à un moment donné, on aura comme la phobie des réseaux sociaux, notre humeur va forcément changer. »
Ce harcèlement en ligne a des conséquences sur le bien-être mental des personnes qui en font l'objet. « Donc, je ne peux pas dire que ce qui se passe sur les réseaux sociaux, c'est une autre vie, et ce qui se passe chez moi, c'est une autre vie,poursuit la journaliste d'investigation.C’est pour ça que je fais des efforts, et je conseille aussi aux collègues d’en faire, afin de trouver des méthodes pour se protéger quand on est en ligne. »
Protéger ses outils de travail pour protéger ses sources
De plus, les mêmes outils de recherche en source ouverte qu’utilisent les journalistes pour enquêter sont de nature à se retourner contre eux, tout comme leur téléphone ou leurs ordinateurs qui peuvent être espionnés, ce qui conduit parfois à aussi mettre en danger ceux qu’ils ont interrogés.
Il faut donc agir avec prudence, selon Jones Baraza, expert en cybersécurité pour le réseau Code for Africa : « Avec l’émergence de nouvelles technologies, on voit aussi apparaître de nouveaux dangers pour les journalistes. Il faut que les individus et les rédactions mettent en place des règles pour s’assurer d’avoir un minimum de sécurité. »
Dans une déclaration adoptée à la fin de la conférence sud-africaine, les participants ont réclamé plus d’efforts de la part des gouvernements et des rédactions du continent, afin de mieux protéger les journalistes et sauvegarder la liberté d’expression.
Retrouvez les deux premiers épisodes de cette mini-série :
Journalisme d'investigation en Afrique : le rôle de l'IA en question [1/3] Journalisme d’investigation en Afrique : collaborer au-delà des frontières [2/3]Wed, 13 Nov 2024 - 1165 - Journalisme d’investigation en Afrique: collaborer au-delà des frontières [2/3]
L’université du Witwatersrand à Johannesburg, en Afrique du Sud, a accueilli fin octobre la conférence annuelle sur le journalisme d’investigation en Afrique. Du fait de la complexité des réseaux mondiaux et de la diminution des ressources des rédactions, le travail d’investigation se fait de plus en plus en équipe, avec des collaborations qui voient le jour sur le continent.
De notre correspondante de Johannesburg,
Pour comprendre les crimes transnationaux et leur complexité, difficile de travailler tout seul de son côté. Mariama Thiam, journaliste sénégalaise, en est témoin : « L’expérience que j’ai eue, c'est une collaboration transnationale concernant le trafic de bois de rose au Sénégal, en Gambie, en Chine et en Suisse. Cela permet d’effectuer un travail plus complet et de pouvoir suivre le dossier au-delà de son pays, explique la journaliste. Si je devais faire ce travail en Gambie, ce serait plus compliqué pour moi parce que je n’ai pas forcément les bons contacts. Et quand on parle de contacts, c'est aussi la confiance qui est établie entre le journaliste et la source et justement, la collaboration permet d'arriver à tout ça. »
La plus grosse enquête à laquelle Emmanuel Dogbevi a participé est aussi un projet de collaboration : en 2018, treize professionnels de différents pays du continent ont eu accès aux bases de données du Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ). En s’associant avec la Cenozo (la Cellule Norbert Zongo pour le journalisme d’investigation en Afrique de l’Ouest), ils ont dévoilé différents cas de malversations et de blanchiment d’argent dans la région, connus sous le nom de « West Africa leaks ». Pour Emmanuel Dogbevi, la portée du projet n’aurait pas été la même s’il avait simplement travaillé sur son pays, le Ghana. « Quand on travaille ensemble et qu’on publie une enquête commune, sur le même thème, mais avec des angles et des sujets différents, cela aura potentiellement plus de poids. Et notre voix porte mieux, car on est nombreux. »
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Manque de moyens
Mais très souvent, les projets de collaboration viennent des pays occidentaux, qui possèdent plus de ressources en termes de données, d’expertise et surtout d’argent. Maxime Domegni en charge de la zone francophone du continent pour le GIJN, le Réseau international des journalistes d’investigation : « Vu que les ressources sont limitées dans la région, il se trouve qu’en général, pour les grands projets collaboratifs qui existent, les ressources viennent des médias des pays du Nord. Mais, encore une fois, il y a quelques projets qui ont abouti. Parfois, ce ne sont pas forcément des enquêtes à gros moyens, il peut y avoir des "petites enquêtes" traitées en collaboration avec d’autres journalistes,précise Maxime Domegni. C’est vrai que l’on n’a pas encore atteint le niveau souhaité en matière de collaboration, mais les choses progressent sur le terrain. »
Travailler en groupe offre aussi plus de protection, avec des journalistes qui se retrouvent moins isolés face aux menaces et aux tentatives pour les faire taire sur le continent.
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Tue, 12 Nov 2024 - 1164 - Journalisme d'investigation en Afrique: le rôle de l'IA en question [1/3]
L’université du Witwatersrand, à Johannesburg, en Afrique du Sud, a accueilli, en octobre dernier, la conférence annuelle sur le journalisme d’investigation en Afrique. Au cœur des discussions : l’utilisation des nouvelles technologies pour creuser des enquêtes, et notamment le rôle de l’intelligence artificielle. Un outil plein de promesses, mais encore peu maîtrisé et dont on découvre l’étendue des possibles en tâtonnant.
Voici Alice, présentatrice des journaux en ligne du média zimbabwéen CITE (Le Centre pour l’innovation et la technologie). Mais Alice n’existe pas vraiment : elle a été créée grâce à l’intelligence artificielle. Pour Lulu Brenda Harris, l’une des « vraies » reporters de l’équipe, cela permet de dégager du temps pour faire du travail d’enquête : « Les journalistes humains produisent le contenu et on écrit un script, que l’on donne à Alice pour la présentation. Notre rédaction n’a que trois reporters. Donc maintenant, on a du temps pour faire davantage de reportages de fond, car on sait que la présentation de l’information sera gérée par Alice. »
Place de l'IA dans les rédactions
Au-delà de cet exemple, l’IAoffre aussi de nouveaux outils afin de traiter un grand volume de données, ce qui peut être intéressant pour enquêter, selon Henri-Count Evans, professeur de journalisme à l’université d’Eswatini : « On peut maintenant télécharger un ensemble de données, et rédiger un prompt avec des instructions, pour obtenir certaines réponses, et cela peut aider à aller dans la bonne direction. C’est un moyen intéressant pour combler un manque de compétences, puisque jusqu’à présent, lorsque les journalistes avaient besoin d'analyser des données, ils n’avaient pas forcément les connaissances pour le faire. »
L’IA peut cependant aussi servir à manipuler les images et l’information. Pour Narcisse Mbunzama, expert numérique congolais, il est crucial pour les journalistes de se familiariser avec ces outils : « Avec le développement des technologies, si vous n’êtes pas à jour, vous serez mis hors-jeu. Et il sera difficile, par exemple, pour un journaliste qui ne maitrise pas les outils de l'IA, de pouvoir identifier certaines vidéos. Il faut vraiment avoir des compétences beaucoup plus avancées, soit dans l’utilisation des logiciels de l’IA, ou dans le fact-checking, pour pouvoir être en mesure d'identifier ce genre de vidéos. »
Mais ces technologies ne sont pas forcément conçues et adaptées pour le continent africain, comme le regrette Eman El-Sherbiny, journaliste égyptienne et enquêtrice pour l’ONG Bellingcat : « Par exemple, nous avons essayé de travailler sur le Soudan, en identifiant les incendies et les forêts qui ont été brûlées, mais c’était très compliqué, car il n’y avait pas suffisamment de données satellites des années précédentes. Je pense que les personnes qui travaillent sur les technologies de l’intelligence artificielle devraient inclure beaucoup plus les chercheurs africains, dès le début. »
L’utilisation de l’IA pour mener des enquêtes journalistiques en est, en tout cas, encore à ses prémices, et de nombreuses utilisations restent à explorer.
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Mon, 11 Nov 2024 - 1163 - Tanzanie: les femmes d'Ukerewe abandonnées par leurs maris pêcheurs [3/3]
Les femmes font partie des premières victimes du changement climatique, et l'intensification du réchauffement de la planète vient souvent bouleverser leur vie. C'est le cas de nombreuses d’entre elles sur l’île d'Ukerewe, sur le lac Victoria, au nord de la Tanzanie. À cause de la montée des eaux et de la diminution de la population de poissons dans les eaux du lac, certains maris pêcheurs décident donc d'abandonner définitivement leur famille pour trouver plus de poissons et de revenus ailleurs, laissant femme et enfants dans une extrême précarité.
C'est un groupe de femmes enjouées qui se retrouve sur un lopin de terre asséchée, entouré de quelques arbres, à Murutunguru, au nord de l'île d'Ukerewe. Parmi elles, Sarah Bigambo, 28 ans et mère de six enfants. En 2021, alors qu'elle était enceinte, son mari pêcheur lui a annoncé qu'il partait : « Quand il est parti, il a dit qu'il avait trouvé un travail sur l'île. Il m'a promis d'envoyer de l'argent et il allait et venait. Mais maintenant, il est parti pour de bon. »
Ce qui a causé le départ de son mari, c'est le manque de poissons. Alors qu'il était auparavant possible d'en pêcher 500 kilos par jour, il est désormais souvent difficile d'en ramener cinq. Utilisation de filets aux mailles trop petites et intensification des pluies liée au changement climatique expliquent cette chute brutale. Des faits confirmés par Joyce Komanya, du Centre juridique et des droits de l'homme à Dar es Salam et auteure d'un rapport sur le sujet :
« Depuis que nous avons commencé à documenter et observer le changement de modèle climatique, nous avons réalisé qu'il pourrait s'agir du changement climatique. Les gens ont vécu dans cette zone et pêché depuis très longtemps, mais nous n'avons jamais vu de tels changements comme ceux actuels. »
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« Nous continuons à nous battre pour nos enfants »
Comme souvent, les femmes sont les premières victimes du changement climatique. Comme Habiba, 47 ans, dont le mari pêcheur a, lui aussi, quitté le foyer : « C'est tellement difficile de trouver de la nourriture. La situation est très mauvaise. Les enfants vont à l'école sans rien manger de la journée, ils reviennent sans énergie. Je leur dis de rester forts, mais c'est très dur. Je ne sais pas où est leur père, il est parti sans même dire au revoir. Nous, les femmes, nous ne pouvons pas juste abandonner nos familles. Nous continuons à nous battre pour nos enfants. »
Habiba et Sarah trouvent du soutien auprès du groupe de femmes Sauti Ya wanawake (« La voix des femmes »), une ONG locale. Ensemble, elles fabriquent du savon qu'elles revendent ensuite. Un maigre revenu pour ces femmes d'Ukerewe, dont l'avenir et celui de leurs enfants restent plus qu'incertain.
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Sun, 10 Nov 2024 - 1162 - Tanzanie: les pêcheurs d'Ukerewe quittent leur île par manque de poissons [2/3]
C'est la plus grande île lacustre d’Afrique. Ukerewe, 500 km² de terre dans les eaux du lac Victoria, située à 50 kilomètres de la ville tanzanienne de Mwanza, est connue pour ses pêcheurs. Mais ces derniers voient leur quotidien menacé par une diminution des stocks de poissons dans le lac. En cause, des pratiques de pêche inadaptées, mais aussi les effets dévastateurs du changement climatique.
« Samaki » (« le poisson » en swahili) est désormais bien difficile à trouver dans les eaux entourant Ukerewe. Pambano Boniface, pêcheur sur le lac Victoria depuis 15 ans, voit ses filets remonter de plus en plus vides : « Vous quittez la maison et naviguez pendant plus de six heures à la recherche de poissons. Vous partez trois ou quatre jours et il n'y a pas de garanties que vous trouverez du poisson. Vous pouvez partir pendant des heures et revenir avec seulement deux kilos de poissons, ou parfois rien du tout. »
L'économie de l'île dépend principalement de la pêche. Alors, certains pêcheurs comme Damien Simon et ses collègues s'essaient à la pisciculture : « C'est quelque chose de nouveau, que nous ne faisions pas dans le passé, où on pêchait normalement dans le lac. Mais nous avons commencé à cause du manque de poissons. »
Changer d'activité
Tous ne peuvent se permettre ces techniques, car le coût de mise en place reste élevé et le gouvernement, même s'il promeut ces méthodes, n'offre pas d'aide au financement. Certains tentent donc de se tourner vers d'autres activités comme l'agriculture, mais ils font face à des défis similaires, comme l'explique Joyce Komanya de l'organisation Centre Juridique et des droits de l'Homme à Dar es Salam : « Ils pensent que de passer de la pêche à l'agriculture va les aider, mais en réalité, les agriculteurs ont, eux aussi, leurs propres problèmes liés au changement climatique. »
Le changement climatique est l'une des causes majeures de ce manque de poissons. Les pluies sont de plus en plus rares, mais les épisodes pluvieux sont de plus en plus intenses, provoquant notamment une montée des eaux du lac. À cela s'ajoutent des techniques de pêche inadaptées avec des filets qui capturent même les plus petits poissons, qui n'ont pas le temps de se reproduire. Pour Pambano Boniface, le futur est incertain : « Je vois un avenir difficile. Si notre présent est rude, le futur le sera bien plus. »
En 2024, le niveau des eaux du lac Victoria est supérieur à toutes les années records enregistrées depuis 1992.
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Sat, 09 Nov 2024 - 1161 - Tanzanie: la montée des eaux du lac Victoria menace l'île d'Ukerewe [1/3]
D'après de nouvelles observations satellites révélées cette année, la montée du niveau des eaux des grands lacs d'Afrique de l'Est est alarmante. Sur le lac Victoria, Ukerewe en Tanzanie constitue la plus grande île lacustre d'Afrique. Sa population vit essentiellement de la pêche et les habitants de l'île sont de plus en plus nombreux à voir leurs vies bouleversées par la montée des eaux du lac.
Depuis la plage de Nansio, sur l'île d'Ukerewe, la vue matinale du lac Victoria semble idyllique. Il suffit pourtant d'un simple regard pour observer plusieurs arbres engloutis par les eaux ici et là. Paschal est guide touristique et originaire de l'île. Il a vu le lac changer ces cinq dernières années : « Je me souviens, par là-bas, il y avait un grand arbre où on avait l'habitude de s'asseoir et manger. Mais ça, c'est de l'histoire ancienne, car il n'y a plus d'arbres, plus d'ombre à cause de la montée des eaux. »
Un peu plus loin, Faustine pointe du doigt un large morceau de plage où des vaches paissent, le corps à moitié submergé dans l'eau. C'est ici que se trouvait la rizière de son père quand il était enfant : « Il y a peut-être d'autres raisons, mais de ce que je vois. Tout ça, c'est à cause de la pluie. Les gens ne peuvent plus cultiver, car il n'y a pas assez de pluie, et quand il pleut, toute la zone est inondée. »
Des populations déplacées
La pluie fait effectivement partie des raisons expliquant la montée des eaux du lac. Même s'ils sont moins fréquents qu'avant, les épisodes pluvieux directs, ainsi que ceux qui alimentent la vingtaine de cours d'eau qui se jettent dans le lac, sont désormais plus intenses. Des changements climatiques qui, au-delà de transformer les paysages, affectent de plus en plus les populations les plus vulnérables de l'île. C'est ce qu'explique Joyce Komanya de l'organisation Centre Juridique et des droits de l'homme à Dar es Salam :
« Les hommes ont beaucoup émigré vers d'autres endroits, donc les femmes sont abandonnées avec les enfants sans ressources. Nous avons aussi noté beaucoup d'abus sur les enfants, une baisse du taux de présence dans les écoles, car même les enfants sont forcés de travailler pour soutenir la famille. »
Le long de la plage, John Ngaile marche sur des pierres englouties. Ce sont les restes de sa maison : « J'ai vécu 15 ans ici et j'ai essayé de construire un mur pour éviter que l'eau ne rentre, mais elle a finalement tout emporté. Ça m'a complètement changé. Je suis désormais très pauvre. »
Avec sa maison, il a aussi perdu ses revenus, puisqu'il louait des chambres. Aujourd'hui, plus de 40 millions de personnes vivent dans le bassin du lac Victoria et sont menacées par la montée des eaux.
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Fri, 08 Nov 2024 - 1160 - Madagascar: quand l’hygiène devient un outil de lutte contre la malnutrition
« Savon » et « malnutrition » : difficile au premier abord, de voir un lien entre ces deux mots. Pourtant, le savon est considéré aujourd’hui comme l’un des outils de l’arsenal déployé pour combattre la malnutrition, et vous allez voir pourquoi. À Madagascar, plusieurs organisations qui interviennent dans les régions fortement touchées par la malnutrition chronique ont mis en place des ateliers pour enseigner la fabrication artisanale de ce produit d’hygiène et permettre de lutter plus efficacement contre ce fléau. Dans la région montagneuse du Bongolava, 52% des enfants souffrent de malnutrition chronique. Reportage sur ces Hautes-Terres centrales.
Le poignet souple, Lanto mélange avec ardeur le liquide blanchâtre dans sa bassine. Progressivement, la pâte s’épaissit. « J’achète les ingrédients au marché à la ville : la soude et l’huile. Après, je rajoute l’eau et je fabrique le savon à la maison, une fois par semaine. Une bassine pleine comme celle-là, ça me fait 60 morceaux. Je vends en priorité aux membres de notre Association Villageoise d’épargne et de crédit. Et s’il en reste, je peux aussi le vendre à d’autres villageois », explique-t-elle.
L'hygiène, un pilier de la lutte contre la malnutrition
Si la vente de savon permet d’accroître les revenus de celles qui en fabriquent, elle a surtout permis de rendre plus accessible un produit d’hygiène de base, mais coûteux, financièrement et en déplacements. Un produit pourtant essentiel dans la lutte contre la malnutrition ... « La lutte contre la malnutrition, c'est évidemment d'avoir une alimentation équilibrée. Mais la cause sous-jacente de la malnutrition, c’est aussi la question hygiène. Et ça, on le sait moins ». Reine Rasoamiaramanana coordonne les actions sur terrain dans la région Bongolava, pour Action Contre la Faim. « Même si on est bien nourri, le manque d'hygiène crée la dénutrition. Je pense notamment aux effets des maladies diarrhéiques ... Donc on promeut les techniques de lavage de mains au niveau de nos bénéficiaires», dit-elle.
Se laver les mains, un geste accessible et vital
Seulement, l’ONG s’est rendu compte que beaucoup de familles bénéficiaires des programmes de lutte contre la malnutrition n’adoptaient pas les comportements enseignés. « Pourquoi ça ? Parce qu’ils n'ont pas à disposition de savon, les savons sont très chers et ne sont pas à leur portée. C’est pour cela qu’on leur a appris à fabriquer eux-mêmes leur propre savon», indique-t-elle.
Dans la commune rurale d’Ambararatabe où vit Lanto et dans ses environs, rares sont donc les habitants qui marchent encore 3 longues heures pour rallier la ville la plus proche pour y acheter du savon. À cinquante kilomètres de là, au pied des collines rases d’Ankadinondry Sakay, Dina et Safidy, deux jeunes agricultrices, se sont elles-aussi lancées dans la production artisanale des précieuses barres blanches. « Avant, j’achetais du savon à chaque fois que j’avais du linge sale. Et quand je n’avais pas d’argent, bah je ne pouvais pas faire la lessive et le linge s’accumulait. Maintenant, plus besoin de se casser la tête pour savoir où et quand trouver du savon : j’utilise le stock que je me suis fabriqué», dit l'une. « Et en plus, c’est 3 fois plus rentable de le faire soi-même !» ajoute l'autre. « Oui, et maintenant, on peut se laver les mains avant de préparer les aliments, et on peut aussi dire aux enfants "filez nettoyer vos mains avec du savon avant de manger !" et ils y vont », raconte-t-elle.
Petits changements pour grands effets. Le lavage des mains au savon a déjà démontré les impacts majeurs sur la santé publique partout dans le monde. Couplé à une alimentation plus nutritive, il contribue aujourd’hui à réduire la malnutrition sur l’île.
Thu, 07 Nov 2024 - 1159 - En Côte d'Ivoire, le festival «Poéticales» veut rendre la poésie accessible à tous
En Côte d’Ivoire, c’est un festival de poésie qui s’est tenu du 4 au 6 novembre à Abidjan. Créé en 2021 par l’écrivaine ivoirienne Tanella Boni, « Poéticales » en est à sa quatrième édition. Pendant trois jours, entre Abidjan et la ville balnéaire de Grand-Bassam, les poètes ivoiriens et les invités internationaux ont célébré la poésie sous toutes ses formes.
De notre correspondante à Abidjan,
Faire de la poésie un art accessible à tous : c’est l’objectif que s’est donné la poétesse Tanella Boni en créant le festival « Poéticales ». Entièrement gratuit, il se décline en panels de discussions, récitals de poésie et spectacles de slam, et entre plusieurs écoles, universités et instituts culturels. Car la poésie, défend Tanella Boni, est indispensable à la vie humaine.
« La poésie, c’est la parole fondamentale, professe-t-elle. Elle dit la vie, elle dit le monde, elle dit le passé, elle dit donc l’avenir. C’est une expérience fondamentale de la vie. Heureusement qu’elle existe ! Elle existe partout dans le monde, elle existe dans toutes les langues. C’est vraiment, je dirais, le langage humain par excellence. C’est ça, pour moi, la poésie. Et c’est pour cela aussi que nous créons cet espace-là, ce festival, pour que les uns et les autres puissent s’exprimer autour de la poésie et en poésie. Dans cette langue faite à la fois de mots, de silences, de rythmes… »
En plus des écrivains ivoiriens, « Poéticales » rassemble cette année sept poètes de plusieurs continents autour du thème « Poésie et Migration ». Les débats, toujours littéraires, sont aussi ancrés dans l’actualité, souligne Hanétha Vété-Congolo, professeure d’université et poétesse martiniquaise invitée à l’un des panels. « Nous sommes ce que nous sommes par migrations, par immigrations, par émigrations. Nous avons vécu et nous vivons encore des formes de déplacement massives. Il est important de proposer un espace de parole à des personnes qui peuvent ne pas en avoir, ou qui peuvent démontrer des difficultés à prendre la parole ou à poser leur parole,défend-elle. Et en effet, en poésie, nous voyons bien des personnes qui se sont déplacées volontairement, ou qui ont été déplacées contre leur gré, se donner la peine d’entrer dans cet espace poétique pour en parler, pour le dire à leur manière. »
À écouter dans Littérature sans frontièresTanella Boni, ne plus se taire et être en paix en Côte d'Ivoire
Migrations et poésie
Le déplacement géographique est aussi bien souvent une source d’inspiration. Le poète et psychiatre canadien d’origine haïtienne Joël Des Rosiers va même jusqu’à qualifier l’expérience de la migration « d’expérience poétique ». « Aujourd’hui, beaucoup de poètes s’enrichissent auprès de ces pays, de ces terres étrangères qui ne sont pas les leurs, mais qui deviennent les leurs. Il y a une appropriation qui, je pense, fait partie d’un universel humain. Mais cela pose aujourd’hui la question des transgressions frontalières. Comment passer [les frontières] ? »
Aussi qualifie-t-il le « poème de la migration » de « poème qui se balance entre la vie et la mort ».« Les traversées du désert, les traversées de la mer, les traversées des forêts,énumère-t-il…Les gens meurent vraiment. Les enfants meurent. Les femmes sont violées, les petites filles sont violées. Nous vivons dans un monde où le poète a désormais une place pas seulement pour dénoncer, mais pour annoncer, je crois, pour annoncer à l’homme et à la femme ses compétences à aimer, à considérer la terre comme étant à tous et à toutes. C’est un problème majeur. Les frontières sont nécessaires, et en même temps, elles sont faites pour être traversées. »
Dans son livre Métaspora, Joël Des Rosiers évoque ce qu’il appelle « les patries intimes ». « Les questions aujourd’hui ne sont plus d’ordre identitaire, explique-t-il. La question, ce n’est pas :“Qui suis-je ?”. La question, c'est : “Où suis-je ?”. Et donc c’est la fabrication des lieux qui se superposent, qui se distendent, qui se rejoignent, à travers cette expérience de la migration, du départ, du voyage, du retour quelquefois. Donc le poème se situe dans toutes ces dimensions-là, qui sont des dimensions créatrices très puissantes désormais.»
Pour ceux qui auraient manqué le festival « Poéticales », le collectif ivoirien L’École des poètes organisera son propre festival international de poésie à Abidjan, axé celui-là sur le slam, au début du mois de décembre.
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Thu, 07 Nov 2024 - 1158 - Présidentielle américaine: comment les Centrafricains la perçoivent-ils?
Une femme réussira-t-elle à capter le vote des Américains pour accéder à la Maison Blanche ? C’est la principale question que les gens se posent en Centrafrique, l’un des pays du continent où cette élection est suivie de près. Dans les rues de la capitale Bangui, les partisans du candidat républicain Donald Trump affrontent ceux de la démocrate Kamala Harris, dans des débats parfois houleux comparant les projets des deux candidats. Dans ce pays où certains croient fermement qu’une femme ne deviendra jamais présidente des États-Unis, d’autres tentent de déconstruire ces superstitions.
De notre correspondant à Bangui,
Allongé sur le canapé du salon de sa maison, une carafe de vin de palme à ses côtés, Jonathan Ngouyagre, jeune entrepreneur, ne rate rien de la campagne présidentielle sur les chaînes américaines. « Je suis un fan des valeurs républicaines, confie-t-il, donc je vais m’aligner derrière Donald Trump. Pour moi, c’est une source d’inspiration, pour tout ce qu’il a fait pour les États-Unis. »
Écharpe à l’effigie du candidat républicain Donald Trump autour du cou, Jonathan est séduit par les projets de son mentor : « Donald Trump, c’est un modèle, sa politique est un modèle d’abord par rapport à l’immigration et également en matière d’ingérence internationale. Parce que pour le président, les États-Unis n’auront plus le droit d’interagir dans tout ce qui est international. »Concernant les sujets de société, Jonathan est aussi favorable au candidat républicain : « Il a parlé également du non à l’avortement, et c’est ce qui est normal en fait. C’est ce qui me plaît. »
À écouter dans DécryptageHarris ou Trump : les enjeux d’une élection historique
Kamala Harris au pouvoir, un espoir pour certains, une crainte pour d'autres
À Bangui, les Centrafricains suivent de bout en bout la course à la Maison Blanche. Portia Deya Abazene, présidente de la Fédération des associations des femmes centrafricaines, nous accueille dans son bureau. Son admiration pour Kamala Harris est grande. « Elle est la première femme élue vice-présidente des États-Unis. Elle soutient, et cela lui tient particulièrement à cœur, les droits des femmes et des minorités. Elle incarne l’optimisme d’un avenir meilleur »,se réjouit-elle.
Selon elle, Kamala Harris est devenue un modèle de réussite pour certaines femmes centrafricaines. « La voir à la Maison Blanche, c’est un moment historique parce qu’elle a toujours placé au cœur de ses ambitions d’ouvrir les portes pour les femmes dans la société. »
Dans les rues de Bangui, les discussions sont parfois houleuses et certaines personnes pensent que les Américains ne sont pas prêts à être gouvernés par une femme. Ce jour marquera la fin du monde, selon de nombreux observateurs. Mais Lionel Koursany ne croit pas à ces superstitions. « Je ne pense pas que l’élection d’une femme est synonyme de la fin du monde aux États-Unis,défend-il,c’est de la rumeur parce qu’il n’y a pas de fondement tangible. Je pense que les femmes peuvent devenir présidentes et les hommes aussi peuvent devenir président. Il n’y a pas d’obstacles. »
Kamala Harris ou Donald Trump ? Les Centrafricains sont impatients de connaître le prochain occupant de la Maison Blanche.
Tue, 05 Nov 2024 - 1157 - Madagascar: les associations villageoises d'épargnants comme outil de lutte contre la malnutrition
À Madagascar, différentes ONG encouragent depuis une dizaine d’années les habitants des zones rurales à se regrouper en Avec (Associations villageoises d’épargne et de crédit). Des sortes de tontines, qui permettent à leurs membres d’obtenir des emprunts pour financer de nouvelles activités génératrices de revenus et de récupérer à la fin de chaque cycle de collecte un petit capital qui a fructifié pendant les neuf mois de collecte.
De notre envoyée spéciale à Ankadinondry Sakay,
Dans le Bongolava, région des Hautes Terres centrales, différents villages ont adopté ces nouveaux moyens d’entraides.
Comme tous les vendredis à 6h, Nirina Ranomenjanahary, président de l’Avec d’Ankadinondry Sakay, se réunit dans une cour à l’abri des regards avec les seize autres membres. « Bienvenue à vous qui êtes ici pour notre réunion d’aujourd’hui ! Je vais commencer par vous présenter les derniers chiffres de notre cagnotte. » Ensemble, ils décident de l’octroi de crédits.
Autour de lui, des poussins ne cessent de piailler et interrompent la réunion. Ils sont la fierté de l’agriculteur. C’est grâce à l’emprunt de 30 000 ariarys (soit 6 euros) auprès de l’Avec que Nirina a pu s’acheter une poule.
« Tu achètes une poule qui te donne 13 poussins. Avec 30 000 ariarys, j’ai réussi à avoir 14 poules ! »,se réjouit le président de l'Avec. Avec fierté, il montre la « maman », une petite poule noire.
« C'est simple et rapide »
« Avec notre association villageoise, c’est simple et rapide,poursuit Nirina Ranomenjanahary. Si j’avais choisi une banque de microfinance, j’aurais dû aller à la ville, on m’aurait demandé plein de papiers, avant de peut-être obtenir un crédit. Mais grâce à l’Avec, j’ai eu ce que je voulais en une journée. Donc, c’est doublement bénéfique ! Pour moi, bien sûr, mais aussi pour les autres membres. Parce que l’argent de la caisse, il prend de la valeur, grâce aux intérêts de 10% versés à chaque remboursement de crédit. »
Nirina prévoit déjà un nouvel emprunt pour s’acheter un cochon. Un projet qui réjouit Bruno Velonosy, superviseur sécurité alimentaire chez Action contre la faim, qui conseille et soutient les membres des Avec.
« Pour nous, l'objectif, c'est l'amélioration des vies des ménages,explique Bruno Velonosy.On travaille avec des personnes vulnérables, donc ils n'ont pas suffisamment d'argent pour faire quelque chose à grande échelle. Donc, on les incite, avec les petits moyens qu’ils ont, à investir dans la mise en place d’activités génératrices de revenus. Parce que si on a plus d’argent, on a accès à une meilleure alimentation. »
Et c’est bien là tout l’enjeu : permettre aux habitants de cette région, fortement touchée par la malnutrition chronique, de trouver des solutions en toute autonomie.
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Des modèles qui se dupliquent à travers la région
Autre village, autre Avec, où l’on procède désormais à la collecte des cotisations des membres. Ici, les membres sont exclusivement des femmes ; c’est l’une d’elles qui a décidé de créer l’association, sans appui d’ONG. Bako Hanitriniaina a adhéré il y a un an et demi, pour « créer plus de lien social », explique-t-elle. Elle emprunte quasiment chaque semaine 30 000 ariarys pour acheter de la provende pour son cochon. Des prêts qu’elle rembourse à la fin de chaque mois.
« Pour le moment, on est en période de soudure, donc les cotisations sont assez faibles, mais dès les récoltes de mars, les cotisations vont réaugmenter et alors on pourra récupérer jusqu’à 300 000 ariarys (60 euros, soit plus que le salaire minimum) à la fin du cycle. »
Une belle aubaine pour les membres. Le Bongolava devrait bientôt compter une centaine d’associations villageoises dédiées au crédit et à l’épargne. La moitié ont été créées par des habitants désireux de dupliquer un modèle observé dans les villages voisins.
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Mon, 04 Nov 2024 - 1156 - Au Bénin, la danse comme thérapie, un reportage de la lauréate de la Bourse Ghislaine Dupont et Claude Verlon
Au Bénin, la danse devient thérapie. Et cette pratique traditionnelle est désormais recommandée par la médecine moderne. Dans les Centres de danse multicorps de Cotonou, des personnes ont choisi d'améliorer leur santé mentale, non pas par les mots, mais par la danse. Un reportage d'un des lauréats de la Bourse Ghislaine Dupont et Claude Verlon 2024.
Onze ans après l’assassinat de nos deux reporters à Kidal, dans le nord du Mali, Ghislaine Dupont et Claude Verlon, RFI a attribué ce samedi 2 novembre, au Bénin, la Bourse portant leurs noms à Victoire Andrène Ombi, journaliste, animatrice à Radio Mucodec (République du Congo), et à Daouda Konaté, technicien à la Radio communale de Katiola (Côte d’Ivoire). Ils bénéficieront d’une formation de quatre semaines à Paris, entièrement prise en charge, au cours du premier trimestre 2025.
Victoire Andrène Ombi a gagné le prix grâce à son reportage sur la danse comme thérapie au Bénin.
À lire aussiVictoire Andrène Ombi et Daouda Konaté, lauréats 2024 de la Bourse Ghislaine Dupont et Claude Verlon
Sun, 03 Nov 2024 - 1155 - La musique congolaise toujours aussi populaire en Côte d'Ivoire
Au pays du zouglou, la rumba occupe une place de choix. En Côte d'Ivoire, difficile d'échapper aux vedettes de la musique congolaise. À la radio ou sur scène, les chanteurs kinois, comme Koffi Olomidé ou JB Mpiana, font des passages remarqués à Abidjan, en attendant le concert de Noël de la superstar Fally Ipupa. Autre signe d'influence, une quinzaine de groupes écument les scènes. Notre correspondant à Abidjan, Benoît Almeras, s'est rendu au Seven Parade, club de Cocody, où l'une de ces soirées rumba s'est tenue.
Pour aller plus loin :
- Amicale des amoureux de la Rumba en Côte d'Ivoire
- Apoutchou National feat Innoss'B « Envoyez-nouveau »
Sat, 02 Nov 2024 - 1154 - Éthiopie: concert d'adieu au Fendika avant la destruction de ce haut lieu de la culture du pays
Addis-Abeba, la capitale éthiopienne, est en pleine transformation. Cheval de bataille du Premier ministre Abiy Ahmed, le projet de ré-urbanisation comprend l'élargissement des rues et la modernisation de l’espace public. Des lieux et des quartiers historiques emblématiques disparaissent, comme l'ancien quartier touristique de Piazza, construit au début du XXe siècle et rayé de la carte. Aujourd’hui, c'est le cas du Fendika, centre cosmopolite, multiculturel, de renommée internationale, qui a disparu sous les bulldozers.
De notre correspondante à Addis-Abeba,
Le Fendika est bondé pour le dernier concert, la dernière soirée avant la destruction. Dans la salle bas de plafond à la lumière chaleureuse, les murs sont recouverts d'objets d'arts et d'instruments de musique provenant du monde entier. Comme une caverne pleine de trésors. L'atmosphère est joyeuse, mais au fond, les cœurs sont tristes, comme Méki, un habitué du lieu :
« J'imagine que tout a une fin, mais là, j'ai vraiment l'impression que c'est la fin d'une époque. Le Fendika a été le centre de la culture d'Addis-Abeba, une grande partie de la culture urbaine que nous voyons à Addis a commencé ici. Je pense que cette ambiance et cette culture spécifiques, cette diversité et cette convivialité prendront du temps à se reconstruire. »
Le Fendika, situé dans le quartier de Kazanchis, en grande partie détruit, va faire place à de grands boulevards bordés d'immeubles modernes. Pour Gelane, la réurbanisation est trop brutale : « Je comprends la nécessité d'innover. Mais il y a de meilleures façons de le faire. C'est la même chose pour Piazza. Je comprends que certaines parties devaient disparaître, mais en démolissant sans stratégie, sans plan, nous avons perdu toute une partie de notre histoire que nous ne pourrons jamais récupérer. Et lorsque cette génération mourra, il ne restera plus que des contes à raconter. »
Plus qu'un tas de gravats
Deux jours plus tard, Melaku Belay, fondateur du Fendika et danseur célèbre, se tient entouré de quelques employés sur un tas de gravats. C'est tout ce qui reste du lieu historique. « Je n'y croyais pas jusqu'à hier. Le camion est venu pour détruire Fendika. Ils m'ont même demandé si je voulais le détruire moi-même. Je leur ai dit qu'ils pouvaient faire ce qu'ils voulaient, mais que je n'y toucherais pas. C'est comme mon enfant, alors j'ai juste regardé. »
Sur les 43 employés, 17 vivaient dans le centre culturel. Comme de nombreux habitants de la zone, ils se retrouvent sans toit. Melaku cherche un endroit pour les loger en attendant. Et préfère penser à l'avenir :
« Le Fendika me rend fier. Ce que j'ai fait, c'était visionnaire. Pour les gens, les étrangers, pour la liberté de l'art, pour la créativité, je l'ai fait et j'en suis fier. Je suis aussi très heureux que le gouvernement a accepté de me donner le même emplacement. J'espère qu'il me prêtera de l'argent et qu'on travaillera ensemble. Sinon, je cherche des investisseurs et collecte de l'argent. »
Pour rentrer dans les nouveaux standards, il faut construire un immeuble d'au moins 20 étages. Pour un tel projet, Melaku a d'abord besoin de 1,15 millions d'euros pour obtenir un permis de construire. L'idée : reconstruire le centre multi-culturel du Fendika sur plusieurs niveaux, avec d'autres activités commerciales pour financer la partie artistique et rembourser les investisseurs.
Fri, 01 Nov 2024 - 1153 - Côte d’Ivoire: quand les ainés N'Zima transmettent leur patrimoine culturel lors de l'Abissa
C’est une fête ancestrale qui attire chaque année des milliers de visiteurs à Grand-Bassam, ville côtière située à une trentaine de kilomètres d'Abidjan. L'Abissa, célébration du Nouvel An du peuple N'Zima Kotoko, également présent au Ghana voisin, est bien plus qu’une simple fête. C'est une tradition séculaire où musique, danse et critiques sociales se mêlent pour renforcer les liens au sein de la communauté.
De notre correspondant de retour de Grand-Bassam,
Une semaine après le retrait symbolique de l'Edo-N'gbole, le tambour sacré, le roi des N'Zima Kotoko remet cet instrument au peuple. Les festivités peuvent alors commencer. La place publique s'anime au son des percussions, rythmant le passage à la nouvelle année N'Zima. Mais l'Abissa, c'est bien plus qu'une danse ou un festival musical : c'est aussi une période de remise en question collective, où les clivages sont mis de côté pour renforcer la cohésion sociale.
« Durant cette période, le peuple retire à ses gouvernants leur pouvoir », explique Belin Damoulé, chargé de la tradition et de la valorisation culturelle. « Cela permet de faire la critique de tout le peuple sans distinction. On pourra dire, à cette occasion, si Sa Majesté le roi a commis des actes répréhensibles. L'Abissa comporte plusieurs valeurs : celles du partage, de la cohésion. »
Un centre de formation
Un patrimoine culturel que les anciens souhaitent transmettre aux nouvelles générations. Ainsi, en 2009, un centre de formation a vu le jour afin de perpétuer l'Abissa. Richard Ekra en est le responsable. « La formation théorique tient compte de trois aspects : la connaissance du peuple et de la culture, les fondements de l'Abissa, et puis, tout ce qui a trait à l'organisation sociale, au fonctionnement de la société, détaille le responsable. Et nous avons la formation pratique. À l'Abissa, nous avons la frange des chansonniers. Ceux qui sont les poètes critiques, les instrumentistes. Il y a le groupe des danseurs également que nous formons. »
À ce jour, une soixantaine de jeunes, entre 7 et 17 ans, ont bénéficié de cette formation. Au milieu de la foule, Rose Arlette, sourire aux lèvres, esquisse des pas de danse. Pour cette adolescente, participer à la fête de l'Abissa est une manière de se connecter avec ses racines : « Chaque fois que la période de l'Abissa me trouve en vie, je suis vraiment heureuse et je suis fière d'être N'Zima. C'est très important en tant que jeune de connaître ta culture parce que ta culture, ce sont tes bases. C'est en connaissant ta culture que tu vas pouvoir avancer dans la vie. »
Cette volonté de préserver l'Abissa dépasse désormais les frontières : en août dernier, les sept familles N'Zima de Côte d'Ivoire et du Ghana ont donné leur accord pour inscrire cette fête au patrimoine immatériel de l'Unesco. Un pas de plus pour honorer cette tradition des N'Zima Kotoko.
Thu, 31 Oct 2024 - 1152 - RDC: 50 ans après, le combat de Mohamed Ali contre George Foreman inspire la nouvelle génération
En République démocratique du Congo, le cri « Ali, boma ye » (ndlr, le mot « boma ye » vient du lingala et signifie « Tue-le ») résonne toujours dans la capitale congolaise. Il a pourtant 50 ans ! Un cri qui a célébré la victoire, le 30 octobre 1974, de l’ancien champion du monde poids lourds, Mohamed Ali, contre le tenant du titre, George Foreman. Une première pour le continent africain d'accueillir un combat de cette envergure. Un combat qui inspire toujours les jeunes boxeurs congolais... Reportage.
De notre envoyée spéciale à Bangula,
« Ici, c'est tout ce que j'ai pu garder comme archives personnelles… ». Dans une boîte en carton jauni par le temps, Pierre Celestin Kabala conserve précieusement photos et affiches du « combat du siècle ». « C'est la première affichette pour annoncer le combat », montre-t-il fièrement.
Cela fait 50 ans que Mohamed Ali a vaincu George Foreman dans le stade de Kinshasa. À l'époque, le journaliste avait 27 ans et était au bord du ring. Il n'a rien oublié du combat. « Huitième round, vers quatre heures du matin, Ali a multiplié ses jabs et ses crochets,se souvient-il. Il l'a mis tellement à terre... Tout le stade scandait '' Ali, boma ye ! Ali, boma ye !''. »
Après le combat, les clubs se multiplient
Un chant devenu mythique qui résonne encore à Kinshasa. Judex Tchibandawata est le fondateur du boxing-club La Tête Haute. Il explique que c'est la victoire de Mohamed Ali qui a rendu populaire la boxe dans le pays : « Il n'y avait pas beaucoup de clubs de boxe, il n'y en avait que trois. Moi, j'ai formé le quatrième club. La valeur de Mohamed Ali... Après ça, il y a beaucoup de clubs qui ont commencé à naître. Maintenant, nous comptons plus de 300 clubs. C'est toujours grâce à l'inspiration de Mohamed Ali à Kinshasa. »
Comme un symbole, ses jeunes boxeurs s'entraînent sur le parvis du stade Tata Raphaël (nommé stade du 20 Mai à l'époque) où s'était tenu le combat du siècle.
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« On a suivi nos frères »
Si le passage de Mohamed Ali dans le pays aura été bref, il aura marqué de nombreuses générations de Congolais. Comme Honoré Modabi, entraîneur de boxe : « Nos aînés, qui ont vu Mohamed Ali boxer, ont eu le goût de boxer. Nous aussi, on a suivi nos frères et nos grands frères pour venir encore boxer au stade. Quand on a un combat, on s'inspire des images de Mohamed Ali : on regarde ses combats, comment il courait, comment il faisait son sparring... On se prépare en fonction de Mohamed Ali. »
Safi Lukomo n'était pas née en 1974, mais le combat, elle le connaît par cœur : « J'aime le style de Mohamed Ali. C'est un défenseur. Je vois qu'il n'est pas cogneur, c'est un styliste ! »
Dans ce club, chaque boxeur combat avec l'espoir de devenir le prochain Mohamed Ali congolais.
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Wed, 30 Oct 2024 - 1151 - RDC: à Kisangani, étudier dans une bibliothèque universitaire vieillissante
Dans le nord-est de la République démocratique du Congo, la bibliothèque centrale de l’Université de Kisangani souffre d’un manque criant de livres récents. Surnommée la cathédrale du savoir, cette bibliothèque, construite en 1978, propose 15 000 références, souvent trop anciennes pour être utiles. Conséquence : la consultation des livres par les étudiants est très faible. La poursuite de la numérisation est la solution proposée pour rendre attrayante cette bibliothèque auprès des étudiants.
De notre correspondant à Kisangani,
Assise dans la grande salle de lecture de la bibliothèque centrale de l’université de Kisangani, Unikis, Georgine Mbolele, étudiante, explique pourquoi elle préfère lire ses notes de cours ici. « Je fréquente la bibliothèque de l’Unikis pour des raisons d’étude, je viens souvent lire parce que le lieu est très calme, je viens souvent avec mes propres ouvrages. »
L’insuffisance de livres récents ne facilite pas la recherche, selon Patrick Sungisa, étudiant à la faculté de droit. « La bibliothèque doit encore fournir des efforts pour faire en sorte qu’elle soit capable d’encaisser plusieurs ouvrages dans différents domaines,affirme-t-il,surtout dans le domaine juridique, pour qu’elle arrive à bien servir les étudiants. J’ai eu plusieurs fois à fréquenter la bibliothèque et je trouve qu’il y a carence d’ouvrages. »
Claver Django, le directeur de la bibliothèque, explique différemment cette faible consultation. Pour lui, elle est due à un manque de goût pour la recherche. « Je crois que ce qui manque chez eux, c’est l’initiation à la recherche documentaire pour les pousser à chercher ce dont ils ont besoin. »Les solutions sont donc à chercher en dehors de la bibliothèque :« C’est le système même de l’enseignement qu’il faudrait un peu prendre à partie ; parce qu’on ne les pousse pas [les étudiants] vers la recherche documentaire, et je crois que c’est à cause de cela qu’on ne veut pas avoir la curiosité de trouver dans le fonds documentaire ce dont on a besoin. »
Aller vers le numérique
Pour pallier le manque de livres, les étudiants ont recours à internet. Certains y voient une solution pour relancer la bibliothèque. Il faut, disent-ils, qu’elle se numérise. « Compte tenu du budget d’abord, nous avons opté pour un système d'e-book qu’on télécharge,explique Claver Django, le directeur de la bibliothèque. C’est un peu moins cher par rapport aux moyens qu’on a, et pour cela, nous souhaitons de tous nos vœux avoir la coopération d’autres universités et d’autres partenaires étrangers, qui puissent nous aider à enrichir ce fonds documentaire, surtout sur le plan virtuel. »
Un lot de 25 ordinateurs a déjà été remis par le gouvernement sur les 100 promis. À l’insuffisance des machines s’ajoute le difficile accès au courant électrique et au réseau internet.
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Tue, 29 Oct 2024 - 1150 - Madagascar: le Village, l'atelier de maquettes qui fait renaître les navires d'antan
Bounty, Soleil Royal, Superbe… autant de vaisseaux amiraux qui ont traversé les océans et dont les aventures qui les accompagnent continuent, elles aussi, de traverser les siècles. À Madagascar, en banlieue de la capitale Antananarivo, un petit atelier, le Village, et sa trentaine d’artisans aux doigts d’or font revivre depuis 30 ans ces navires d’exception en fabriquant leurs maquettes. Un savoir-faire unique sur l’île, qui, au fil des années, a acquis une renommée internationale auprès d’une clientèle étrangère.
De notre correspondante à Antananarivo,
Armé de son racloir, Rafah Ralahy rectifiela coque du Soleil d’Orient, un navire de commerce français du 17ᵉ siècle, ayant appartenu à la Compagnie des Indes. Ses doigts caressent le bois encore rugueux, comme pour mieux y déceler les aspérités à gommer. Lui est accastilleur. « Mon travail, c’est d’être le plus fidèle au plan. Donc, à chaque étape, pour que la maquette qu’on crée soit identique au navire conçu il y a des siècles, on fait les rectifications », explique le sexagénaire, les yeux rivés sur l’immense plan étalé sur son établi.
Dans la même pièce, en face de lui, Tovo-Hery Andrianarivo façonne les balustres du château arrière d’un navire de guerre du 18ᵉ siècle. Ciseau à bois à la main, ses gestes sont d’une précision extrême. Comme la plupart de ses camarades autour de lui, il a trente ans d’expérience. « J’aime mon métier, parce que c’est de l’art. Et je suis fier de voir nos maquettes voyager partout dans le monde. Une fois, mon ancien patron m’a montré un documentaire sur le navire Hermione, qui reprenait la mer,se rappelle-t-il. Derrière le conservateur du musée qui parlait, il y avait notre maquette. Le sentiment que j’ai ressenti ce jour-là était incroyable ! »
« C’est ce qui attire les têtes couronnées »
Le Village, c’est un clan. Les employés appartiennent à une quinzaine de familles différentes et habitent le même quartier. La plupart ont été formés en interne par le fondateur, un maquettiste naval français qui a depuis revendu l’entreprise. Quant aux plus jeunes artisans, ils sont souvent les enfants des « anciens ».
Et si l’atelier a su résister aux tempêtes provoquées par les crises économiques et sociales répétées dans le pays, « c’est grâce à la qualité unique des productions des artisans », affirme Grégory Postel, propriétaire du Village depuis 2023.
« On est sur ce qui se fait de mieux dans le monde, on n’a pas peur de le dire ! C’est même notre marque de fabrique. Il y a d’autres concurrents qui font des très belles pièces, mais pas aussi abouties que les nôtres », précise-t-il. Dans le jargon, on appelle cela « la finition musée ».
« Forcément, ça nécessite plus de travail, plus de finitions,poursuit le propriétaire du Village.Mais je pense que c’est ce qui attire par exemple les têtes couronnées, qui cherchent vraiment le produit pur, parfait, qui ressemble à ce qu’ont connu leurs aïeux lorsqu’ils étaient rois de leur pays dans les années 1600-1700. »
Le prince Albert de Monaco, la famille royale d’Espagne, le pape François... ces personnalités possèdent au moins une des maquettes de prestige réalisées ici.
Des commandes spéciales ou proposées sur catalogue, comme ce Soleil Royal, de 1,20 m de longueur, sur lequel les quatre artisanes de l’atelier gréement achèvent de tendre la dizaine de mètres de cordages durcis à la cire d’abeille et hisser les pavillons. Il aura fallu 15 personnes et plus de 800 heures de travail pour concevoir cette pièce d’exception, vendue 5 300 euros hors frais d’envoi, à un particulier en France.
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Sun, 27 Oct 2024 - 1149 - Les dangers de la consommation d'alcool frelaté chez les jeunes
Au Tchad, bien que les autorités aient interdit l’importation, la fabrication, la vente et surtout la consommation des alcools frelatés, certains jeunes s’adonnent à leur consommation et de manière abusive. Ce qui n’est pas sans conséquence sur leur santé.
De notre correspondant à Ndjamena,
Au maquis Doulbarid, à Moursal, dans le 6ᵉ arrondissement de Ndjamena, une dizaine de jeunes consomment de l’alcool en sachet. « C’est depuis ce matin qu’ils sont en train de consommer ces alcools, peut-être un carton déjà. Et pire encore, sans manger ! »,lance un passant inquiet.
Vendues sous différentes appellations, ces boissons affichent un taux d’alcool qui varie entre 43 à 45 degrés. Elles se vendent entre 50 à 100 francs CFA l’unité, soit 7 à 15 centimes d’euros. Mais leur consommation n’est pas sans conséquence sanitaire, explique le docteur Dillah Manassé. « Des cas de mort subite ont été enregistrés, relate-t-il.Les comportements à risque peuvent conduire à des maladies cardiovasculaires, gastro-intestinales, des troubles neuropsychologiques, voire l’accélération du processus de vieillissement, parce que c’est de l’alcool falsifié qui contient de l’éthanol industriel et d’autres agents de conservation qui ne sont pas alimentaires, explique le médecin. »Il ajoute : « La consommation diminue l’espérance de vie de plus d’une année. »
« L’État doit agir vite »
Sous couvert d’anonymat, un homme dit avoir perdu son cousin diplômé le mois dernier, en raison de la consommation abusive d’alcool frelaté. « Mon cousin, il exagérait, témoigne-t-il.Dès 6 h, il était soul. On n’accuse personne, on était fatigués de lui parler. »
Pour la Croix-Bleue tchadienne, qui lutte contre la consommation d’alcool, beaucoup reste à faire du côté de l’État en termes de répression. « L’État a fait un effort pour prendre un décret, le décret 2835 en 2022. Vu les méfaits de cet alcool dans la jeunesse surtout, l’État doit agir vite,affirme Gonba Tao Anatole, le vice-président de l’organisation. Il faut que la police sanitaire soit opérationnalisée pour pouvoir, faire son travail. »
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’alcool frelaté serait responsable de la mort de plus de 100 000 personnes chaque année. Au Tchad, malgré les démarches, il est difficile d’avoir des statistiques sur cette consommation faute d’études dans le domaine.
À écouter dans Priorité santéDéfi de janvier : un mois sans alcool
Sun, 27 Oct 2024 - 1148 - En Côte d'Ivoire, les Rencontres internationales de la Marionnette d'Abatta enchantent le public
Les Rencontres internationales de la Marionnette d’Abatta (RIMA), un quartier d’Abidjan, sont de retour en Côte d’Ivoire du jeudi 24 au samedi 26 octobre. Pour sa quatrième édition, le festival de marionnettes a pour thème « L’Eldorado, c’est ici », et vise à encourager des vocations de marionnettistes chez les jeunes.
De notre correspondante à Abidjan,
« S’il y a un policier qui passe, on n’hésite pas à “bang bang bang bang bang !”... Ou un militaire, “bang bang bang bang bang !”... Même les politiques, de temps en temps, “ping ping ping ping”... Voilà ! » Alban Thierry dirige la compagnie française Zouak, qui revisite le légendaire personnage de Polichinelle, bossu, ventru et armé d’un bâton.
Lui et sa compagnie ont été invités à l’académie Ivoire Marionnettes, dans le quartier d’Abatta, pour dispenser une formation d’une semaine à l’art complet la marionnette. « On construit avec eux des marionnettes portées, et moi, je fais la mise en jeu, explique Alban Thierry. Moi, c’est plus la manipulation et le jeu qui sont mes spécialités. On leur apprend aussi la connaissance de toutes les techniques qui existent dans la marionnette, aussi bien traditionnelles que contemporaines. Pour apprendre une culture générale aussi bien dans la manière de jouer, d’être, mais aussi dans la connaissance de l’histoire de la marionnette et de ses possibilités, ses faisabilités, quels rapports scéniques elle donne… Mais on aime bien le côté un peu comique, la marionnette sert quand même à faire rire ! Après, il y a plein de courants, contemporains surtout.»
Vingt jeunes Ivoiriens ont appris avec la compagnie Zouak à fabriquer et à mettre en scène ces marionnettes « portées », une technique bien particulière qu’explique Romain Duverne, l’associé d’Alban Thierry chargé de leur confection. « Elles ont une tête grosse comme les nôtres, à peu près. Elles ont une poignée derrière la tête, elles sont peintes à l’acrylique, donc elles ont un regard, une coiffure… Et en dessous, elles ont un buste, un buste en mousse ! Un buste en mousse qui vient s’accrocher à la taille du manipulateur. Du coup, les jambes du manipulateur deviennent les jambes du personnage. Donc c’est une marionnette hybride. C’est une manière assez simple d’appréhender la marionnette. »
Les élèves n’ont pas démérité et leur spectacle satirique a séduit les centaines de spectateurs, officiels et badauds, venus assister à la cérémonie d’ouverture. Le festival propose ensuite jusqu’à samedi une vingtaine de représentations de marionnettes : certaines géantes, d’autres à tailles humaines et d’autres encore d’une quinzaine de centimètres de haut.
C’est le cas de la pièce de la compagnie béninoise Irikpe Sabouyo, « Le petit Akli », qui a mis en scène devant l’orphelinat de Bingerville, à l’est d’Abidjan, le voyage initiatique d’un adolescent. « C’est un jeune têtu, audacieux qui, malgré le refus de ses parents, décide de se rendre dans la forêt pour prendre son piège à rat,raconte le conteur et marionnettiste Romaric Adjogbe, metteur en scène d’Irikpe Sabouyo. Parce que son oncle lui avait promis qu’à un âge donné, il lui donnerait un piège à rat. Il n’a pas vraiment l’âge, mais il est impatient. Du coup, il a décidé de quitter la maison un beau matin vers la forêt. Sur le chemin, il a rencontré des esprits mauvais, des gros animaux qui l’embêtaient. Mais il s’en est sorti grâce à l’aide d’un vieux chameau, qui maîtrise tous les coins du village et de la forêt. Il lui ment en lui promettant une grosse récompense, mais comme son papa est généreux, c’est finalement lui qui offre la récompense à son retour.»
La pièce, qui mêlait des marionnettes à d’autres arts circassiens, comme le monocycle et le jonglage, a reçu un accueil très enthousiaste de la part des enfants. « C’était dans un village, et puis il y avait un enfant impoli, il ne faisait pas les bonnes choses, tente de se remémorer le jeune Othoniel, 7 ans. Il a traversé la forêt tout seul, et puis sur le chemin il a rencontré un vieux qui lui a donné des bananes ! J’ai aimé le jonglage, et puis le vélo, et puis les marionnettes, et puis l’histoire. »
À la découverte du métier de marionnettiste
En plus du divertissement, l’objectif du festival est de faire découvrir la profession de marionnettiste aux jeunes, pour encourager l’insertion professionnelle par l’auto-emploi, indique Badrissa Soro, le commissaire général des RIMA. « Nous estimons que l’art de la marionnette est un métier complet. Un marionnettiste bien formé peut vivre de son art. La marionnette fait appel à plusieurs disciplines artistiques et métiers, notamment la menuiserie, la ferronnerie, la peinture, l’écriture, le modelage… L’art de la marionnette est une chaîne de valeur. C’est pourquoi nous voulons, à travers l’art de la marionnette, former des jeunes qui pourront s’insérer dans le tissu social à leur compte. Nous avons choisi comme thème des RIMA cette année “L’Eldorado, c’est ici”. Parce que nous estimons qu’un artiste bien formé peut vivre de son art dans son pays. Il faut qu’on arrête de se jeter à l’eau, d’endeuiller l’Afrique parce qu’on veut aller au paradis. Le paradis, c'est partout, je pense qu’on peut créer notre paradis ici, à travers notre métier, si on est bien formés et bien structurés. »
La Côte d’Ivoire compte une douzaine de compagnies, qui regroupent environ 70 professionnels de la marionnette. Et 15 des 20 étudiants formés cette année ont déjà demandé à rejoindre leurs rangs.
À lire sur les Rencontres de 2023Côte d'Ivoire: des Rencontres internationales de la marionnette de plus en plus ouvertes aux femmes
Sat, 26 Oct 2024 - 1147 - À Brazzaville, le public est au rendez-vous du Festival international du rire «tuSeo»
La 17e édition du Festival international du rire de Brazzaville «tuSeo» a démarré ce 24 octobre. Une vingtaine d’artistes venus de sept pays prennent part à ce grand rendez-vous de l’humour qui fête ses 20 ans cette année et célèbre à cette occasion l’importance de la paix.
De notre correspondant à Brazzaville,
Dans la salle Savorgnan de l’Institut français du Congo (IFC), le public, venu nombreux, rit aux éclats en entendant les anecdotes et scènes de vie dépeintes dans les spectacles.
Parmi les humoristes figure le Camerounais Valery Ndongo qui a parcouru 1 500 kilomètres de route, entre Yaoundé et Brazzaville, en deux jours. « Quand on fait de la route, il y a des aventures et des mésaventures. C’était marrant. Il y a des histoires que je vais raconter pendant le spectacle et d’autres que je vais raconter quand je vais rentrer au Cameroun », raconte-t-il. « Je vais le raconter au Cameroun, parce que si je dis ça ici, les gens peuvent se fâcher», plaisante l'humoriste.
Valery Ndongo revient au Festival tuSeo dix ans après sa première participation qui remonte à 2014. Pour lui, faire rire un public est le plus beau métier qui soit. « On fait du spectacle vivant. Et notre métier n’a de sens que quand on a un public face à nous ; quand on peut jouer, quand on peut partager des émotions, quand on peut donner du plaisir au public ; quand on peut permettre qu’un public vienne et qu’il rentre heureux, détendu d’avoir passé un moment heureux, une bonne soirée », soutient-il.
« Quand on ne rit pas, on tombe malade»
Lancé en 2004, tuSeo a déjà 20 ans. L’artiste burkinabé Gérard Ouédraogo y participe pour la première fois. Il est venu d’abord présenter un guide pratique de formation en humour. « C’est un projet qui a été financé par le Fonds de développement culturel et touristique du Burkina Fasoparce qu’il y a une jeunesse derrière qui a envie d’embrasser le métier de l’humour. Maintenant, il leur faut une référence. Le débutant va apprendre pour affronter son public et le professionnel va apprendre pour transmettre demain», indique Gérard Ouédraogo.
À écouter dans 8 milliards de voisinsPeut-on apprendre à être drôle?
Lors de la précédente édition de tuSeo, les humoristes ont beaucoup sensibilisé sur la protection de l’environnement. Le rire a été écologique. Cette fois-ci, l’accent est mis sur la paix. Lauryathe Bikouta est la promotrice du Festival : « Sans la paix, on ne peut pas rire ; même pendant les moments difficiles, il y a le rire de sauvetage qui est là quand même. Je me rappelle, pendant la guerre civile de 1997 (au Congo), je pensais qu’on ne pouvait pas rire ; mais il y avait des moments de rigolade quand même. On ne peut pas s’empêcher de rire dans la vie, même quand ça fait mal, quand c’est difficile. C’est quelque chose qui est en nous, parce que ça va de pair avec la santé. Quand on ne rit pas, on tombe malade», affirme-t-elle.
TuSeo ayant résisté à l’épreuve du temps pendant deux décennies, Lauryate Bikouta promet que ce Festival vivra toujours.
Et chaque jour, prenez votre shoot de rigolade avec les humoristes RFI Mamane et Charlotte Ntamack.
Fri, 25 Oct 2024 - 1146 - Kadeux, le nouvel espoir de la musique tchadienne
Il a été propulsé sur le devant de la scène avec le succès de son premier titre Ayéhan sur le réseau social TikTok. Le jeune chanteur Kadeux confirme son statut de nouvel espoir de la musique tchadienne, tout en gardant les pieds sur terre.
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Thu, 24 Oct 2024 - 1145 - Centrafrique: à Bangassou, le vélo est un outil incontournable pour les femmes
En Centrafrique, l’usage du vélo est omniprésent chez les femmes de Bangassou à l'est dans la préfecture du Mbomou. Dans cette ville d'environ 30 000 habitants, la plupart des personnes du sexe féminin âgées entre 12 et 45 ans sont des utilisatrices de la petite reine. De l'aube au coucher du soleil, on ne s'étonne pas de les voir sur ces engins à deux roues portant de lourdes charges, allant aux champs ou aux marchés hebdomadaires. Les grandes artères de la ville et les pistes rurales offrent tous les jours des spectacles impressionnants de femmes qui se déplacent pour assumer leurs activités socioéconomiques. L’usage féminin du vélo est devenu une tradition locale, bien plus que dans le reste du pays.
« Apprends à ta fille comment pédaler avant de marcher», voilà un chant et une chorégraphie qui font la particularité de Bangassou. Très tôt ce matin, après avoir enfilé une culotte en pagne, un look lui permettant de mieux pédaler, Pélagie roule sur cette piste en latérite qui relie Bangassou au village de Niakari.
Grâce à son vélo, cette mère de huit enfants peut transporter plusieurs kilogrammes de marchandises. « Ce vélo me permet de ne pas trop sentir la distance de mon champ qui se trouve à 20 kilomètres. Au départ, je faisais les allers-retours à pied et je portais les produits champêtres sur la tête. C'est pour me faciliter la tâche que mon mari m’a offert ce vélo. Depuis dix ans, je transporte tous mes produits agricoles sur ce vélo », se réjouit-elle.
La bicyclette pratique sur les routes accidentées
À Bangassou, depuis le début des années 60, le vélo s'impose dans toutes les activités socioéconomiques des femmes. Angela est une griotte. Ces 20 dernières, elle va de village en village avec son vélo pour véhiculer des messages : « C'est surtout le moyen le mieux adapté pour atteindre les zones reculées, dépourvues de routes. En deux ou trois jours, je peux faire le tour de plusieurs villages pour annoncer les prochaines campagnes de vaccination, la rentrée scolaire, les élections malgré l'insécurité ».
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La pratique du vélo est devenue une tradition pour les femmes de Bangassou. Parmi les utilisatrices, il y a également des vendeuses ambulantes et des élèves. Gaston est l'un des sages de Bangassou. « Le vélo permet aux femmes d'être aujourd'hui au cœur des activités socioéconomiques,explique-t-il.Chaque mari fait de son mieux pour offrir un vélo à son épouse. On préfère le vélo parce que ça coûte moins cher par rapport à un véhicule ou une motocyclette. »
Une pratique non sans risques
Cette valeur se transmet de génération en génération. Mais aujourd'hui, la pratique du vélo n'est pas sans conséquence chez certaines femmes. Ronelle en a fait les frais : « Parcourir des kilomètres à vélo augmente les douleurs musculaires. Une fois, je me suis fracturée la jambe gauche après un accident. C'est aussi pénible de faire du vélo...»
Si le vélo occupe une place importante dans la vie des femmes, il n'y a pas une usine de montage ou de fabrication de vélo à Bangassou. Ces deux roues sont importés de l'autre côté de la rive en République démocratique du Congo.
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Wed, 23 Oct 2024
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